Description
De nos jours, il est plutôt rare que l’on puisse encore produire des outils pédagogiques originaux. Pourtant, après analyse, il en ressort que l’on peut dégager plusieurs grands traits inédits dans ce nouveau Dictionnaire illustré de français langue étrangère/langue seconde.
À la base, l’auteur ne s’est pas contenté de se demander, sous la forme d’une introspection, quels pourraient être les contenus langagiers qui, à son avis, seraient utiles aux apprenants de FLÉ/FLS. L’une des grandes forces de ce dictionnaire est que toutes les entrées et toutes les phrases-exemples sont tirées d’un corpus de documents oraux et écrits réellement proposés aux apprenants, sous la forme de 32 manuels de FLÉ/FLS, et de diverses ressources de préparation au DELF. Aucun élément du corpus n’a été écarté. La richesse des contextes dans lesquels on retrouve les entrées témoigne tout à la fois de la créativité des auteurs de manuels et de leur volonté d’offrir aux apprenants des modèles diversifiés.
Autre originalité : l’œuvre est de facture véritablement internationale en attestant de la vitalité de la francophonie d’aujourd’hui. Ainsi, l’auteur a osé inviter le français de l’Île-de-France à fréquenter des variantes lexicales émanant des diverses populations francophones, sans les « marquer » de valeurs sociales ou régionales. De plus, l’ajout de nombreuses capsules culturelles constitue un apport important à la formation des apprenants, à une époque où il n’est pratiquement question, en didactique des langues, que de perspectives pluri- et interculturelles.
Enfin, il s’agit d’un dictionnaire vraiment pédagogique. Dans le traitement des contenus, plusieurs éléments de nouveauté pourraient surprendre les enseignants et les apprenants habitués aux dictionnaires classiques conçus par des savants et destinés à ceux qui connaissent déjà la langue. Car on retrouve chez l’auteur le parti pris d’un enseignant de FLÉ/FLS. Par exemple, quoi de plus frustrant, pour un apprenant apprenti, que de ne pouvoir repérer, dans un dictionnaire, des formes d’apparence aussi simples que sommes ou que vont ? Ici, les formes fléchies des verbes fréquents apparaissent à leur entrée et renvoient, bien entendu, à la forme infinitive correspondante. Un autre exemple : le genre des noms, grande source de difficulté pour les apprenants de FLÉ/FLS, est toujours indiqué par ses déterminants singuliers (le, un ; la, une), conformément à l’usage courant de la langue. Un troisième exemple : une technique originale pour simplifier l’orthographe des verbes, soit le recours à deux tableaux de terminaisons, sur les rabats de la couverture, qui simplifie le fameux problème de la conjugaison verbale, tout en mettant en évidence les terminaisons régulières de la grande majorité des verbes français.
Ces quelques points innovants que je tenais à signaler – il y en a bien d’autres dans l’introduction de l’auteur – montrent, dans le Dictionnaire illustré de français langue étrangère/langue seconde, toute l’importance d’adapter les outils de référence aux besoins des apprenants. Le poids des mots dans l’apprentissage d’une langue explique-t-il que les dictionnaires sont toujours… si lourds à porter ?
Je me souviens d’avoir lu quelque part que, si l’on voulait infliger une douloureuse punition aux condamnés, il suffirait de les obliger à rédiger des dictionnaires ! Une boutade qui en dit long, quand même, sur la difficulté de la tâche réalisée par Clément Beaudoin. Un ouvrage, quel qu’il soit, révèle une bonne part de la personnalité de son auteur. Il en a fallu de l’audace et du courage pour se lancer dans ce travail de bénédictin, car c’est bien de cela qu’il s’agit : un travail intellectuel de longue haleine, exigeant soin et patience. Mission accomplie avec panache et originalité.
Claude Germain, professeur émérite
Université du Québec à Montréal (UQAM)